Non-lieu dans le dossier chlordécone : et maintenant ? 

Non-lieu dans le dossier chlordécone : et maintenant ? 

R. Lamy, France-Antilles Martinique

Sans surprise, dans la lignée des réquisitions du procureur de la République de Paris, les deux juges d'instruction chargées de ce dossier au long cours, ont prononcé un non-lieu ce lundi 2 janvier. Ce qu'il faut retenir. 

1 / Qu'ont décidé les juges ? 

La décision était attendue. Elle a bien été prononcée. Ce lundi, les deux juges d'instruction parisiennes ont prononcé un non-lieu dans l'instruction judiciaire sur l'empoisonnement des Antilles au chlordécone, pesticide autorisé dans les bananeraies jusqu'en 1993,

Selon des éléments de l'ordonnance consultés par l'AFP, les deux magistrates évoquent la difficulté de « rapporter la preuve pénale des faits dénoncés », « commis 10, 15 ou 30 ans avant le dépôt de plaintes », la première l'ayant été en 2006.

Elles évoquent un « scandale sanitaire » mais soulignent que « l'état des connaissances techniques ou scientifiques » et « le faisceau d'arguments scientifiques » au début des années 1990 « ne permettait pas de dire que le lien de causalité certain exigé par le droit pénal » entre la substance en cause d'un côté et l'impact sur la santé de l'autre, « était établi ».

Avançant également divers obstacles liés au droit, les juges, malgré un « souci » d'obtenir une « vérité judiciaire », indiquent avoir abouti à une impossibilité à « caractériser une infraction pénale ».

Fin novembre, Rémy Heitz, le procureur de Paris avait, pour sa part, estimé que les faits étaient prescrits et requis un non-lieu.

 

Que peuvent faire les parties civiles ?

Informées par les médias, ce qu'elles ont d'ailleurs déploré, les différentes parties civiles (associations, syndicats, collectivités) dans ce dossier n'ont pas encore reçu l'ordonnance de non-lieu des juges qui leur a été envoyée par courrier. 

Une fois la décision notifiée ou signifiée, elles disposeront de 10 jours pour faire appel du non-lieu en saisissant la Chambre de l'instruction, selon la procédure établie au titre de l'article 186 du Code de procédure pénal. 

C'est là qu'elles développeront leur argumentaire pour expliquer en quoi, selon elle, il existe des éléments dans le dossier d'instruction permettant, tout en restant dans le cadre de la loi, de prononcer des mises en examen et, à termes, des poursuites judiciaires. 

Si la chambre d'instruction venait, malgré tout à confirmer le non-lieu, les parties pourraient toujours saisir la Cour de Cassation et, in fine, aller jusqu'à la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH).

 

Qu'en dit le gouvernement ?

Dans un communiqué daté de ce jeudi 5 janvier, le gouvernement indique « prendre acte de la décision »  et rester « pleinement mobilisé pour poursuivre la mise en œuvre des mesures nécessaires suite à cette catastrophe ».

 

 

« Face à ce scandale environnemental, le Président de la République est le premier à avoir reconnu solennellement la part de responsabilité de l'Etat en 2018 », souligne le communiqué, rappelant qu'un plan de 92 millions d'euros a été mis en place aux Antilles, avec un triple objectif : protéger la santé des populations, tendre vers le « zéro chlordécone » dans l'alimentation et réparer les impacts de cette pollution au niveau individuel et collectif aux Antilles. 

Selon le gouvernement, des « avancées concrètes ont été réalisées », même s'il reste « beaucoup à comprendre » : les analyses de chlordécone dans le sang gratuite, les analyses de sols gratuites pour les agriculteurs et les particuliers, un dispositif d'aides financières créé en 2022 pour alléger les charges des pêcheurs impactés par la chlordécone, le fonds d'indemnisation des victimes de pesticides qui est opérationnel, « de manière pérenne, pour les personnes ayant déclaré une maladie liée à une exposition professionnelle aux pesticides, dont la chlordécone ».

L'agence nationale de la recherche finance, conjointement avec la Région Guadeloupe et la Collectivité Territoriale de Martinique, 6 projets de recherche sur la chlordécone, à hauteur de 5.53 millions d'euros, dont 5 sur la dépollution des sols et 1 sur l'impact de la chlordécone sur la fertilité des femmes, insiste notamment le gouvernement.

 

 

 

Suivez l'info en temps réel
sur l'appli France-Guyane!

Télécharger